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lundi 9 janvier 2023
Prix 5.3 : Philip Morris réclame un droit de réponse aux accusations du CNCT (1/2)

Prix 5.3 : Philip Morris réclame un droit de réponse aux accusations du CNCT (1/2)

Par courriers du 21 décembre 2022, Jeanne Pollès et Natasha Pouget, respectivement Présidente de Philip Morris France et Senior Manager Engagements Extérieurs et responsable de la RSE chez Philip Morris France, ont chacune demandé un droit de réponse à la suite de la publication par le CNCT le 15 novembre 2022 de l’article intitulé les prix 5-3 sans tabac et sans lobby.

Après réflexion, et par souci de transparence quant aux stratégies mises en œuvre par les industriels du tabac, le CNCT a pris la décision de publier ces réponses dont l’insertion ne s’imposait pas à lui.

Les contenus de ces réponses sont les suivants : 

Jeanne Pollès :

« DROIT DE REPONSE

Directement et personnellement mise en cause dans votre article, j’entends exercer mon droit de réponse.

Je suis régulièrement invitée à m’exprimer publiquement sur la transformation de l’entreprise dont je suis la présidente en France, qui vise à remplacer les cigarettes par des produits sans combustion dont la nocivité est réduite, et ce à destination des fumeurs adultes qui n’arrêtent pas de fumer.

Plusieurs études scientifiques indépendantes, menées dans plusieurs pays, convergent pour reconnaître la moindre nocivité des alternatives sans combustion par rapport à celle de la cigarette, à commencer en France par une étude indépendante réalisée en 2020 par l’Institut Pasteur de Lille.

Dès lors il n’y a pas tromperie ni induction en erreur du grand public comme affirmé à tort par le CNCT ».

 

Natasha Pouget :

« DROIT DE REPONSE

Directement et personnellement mise en cause dans votre article, j’entends exercer mon droit de réponse.

Vous affirmez que j’instrumentaliserais la stratégie RSE du groupe Philip Morris (PMI) dont l’activité serait incompatible avec les préoccupations sociales et environnementales. L’activité de PMI n’est en rien incompatible avec ces préoccupations.

PMI figure parmi les 14 entreprises ayant obtenu la note triple A, décerné par le CDP (Carbon Disclosure Project), organisme indépendant qui applique une méthodologie d’évaluation éprouvée. C’est à ce titre que je suis régulièrement invitée à m’exprimer sur les bonnes pratiques développées dans l’entreprise qui m’emploie.

De même, c’est avec une volonté de dialogue, que j’échange sur les externalités principales de la société et des solutions tangibles pour répondre à cet enjeu de santé publique. Il n’y a donc aucune « distance » ni « conflit d’intérêt » encore moins tromperie entre le discours et la réalité ».

 

Le décryptage du CNCT

Aucune étude indépendante ne permet à ce jour de démontrer que la consommation de tabac chauffé se traduit par une réduction des risques en comparaison des cigarettes manufacturées traditionnelles. L’étude de l’Institut Pasteur citée ci-dessus indique que le « tabac chauffé pourrait être moins nocif que la cigarette manufacturée, mais considérablement plus nocif que la cigarette électronique ». En 2018, une revue de la littérature scientifique consacrée à la toxicité de l’IQOS résumait : « L’IQOS (et probablement le tabac chauffé en général) est simplement différent des cigarettes traditionnelles, et délivre moins de certaines substances toxiques et plus d’autres. »  Ainsi, en fonction des maladies, l’IQOS peut présenter des risques pour la santé inférieurs, identiques ou supérieurs à ceux des cigarettes traditionnelles. Ailleurs, les auteurs de l’étude soulignent que « les propres données de PMI ne corroborent pas l’affirmation selon laquelle l’IQOS est moins dangereux que les cigarettes ».

En réponse à une demande de Philip Morris d’homologation de l’IQOS comme un produit « à risque réduit », la Food and Drug Administration (FDA) est arrivée à  la conclusion que la multinationale « n’a pas démontré » que l’IQOS « réduira de manière significative les dommages et le risque de maladie liée au tabac pour les consommateurs de tabac individuels et bénéficieront à la santé de la population dans son ensemble », en précisant que « les allégations « Des études scientifiques ont montré que le passage complet des cigarettes conventionnelles au système IQOS peut réduire les risques de maladies liées au tabac » et « Le passage complet au système IQOS présente moins de risques de dommages que le fait de continuer à fumer des cigarettes » ne sont pas fondées. »

L’incompatibilité entre le discours de responsabilité sociale de l’industrie du tabac et la réalité des dégâts occasionnés par cette dernière est un fait qui n’est pas seulement relayé par le Comité national contre le tabagisme. Ainsi, la Convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (CCLAT), ratifiée par la France, et 180 autres pays dans le monde, affirme qu’il existe un « conflit fondamental et inconciliable entre les intérêts de l’industrie du tabac et ceux de la santé publique ». A ce titre, les activités de RSE de la part de cette industrie sont proscrites. De la même manière, en 2017, le Pacte mondial de l’Organisation des Nations Unies, ou Global Compact (UNGC) a exclu l’industrie du tabac, au même titre que les entreprises tirant des revenus de la production ou la vente de mines anti-personnel et de bombes à fragmentation, au motif de ce même « conflit d’intérêts entre ces produits et les droits de l’homme, le droit à la santé publique, à la sécurité internationale et à la paix ». Ce principe est admis par une communauté institutionnelle de plus en plus large, comme le Conseil de surveillance du Fonds de réserve des retraites, l’Assemblée générale de Nations Unies sur la prévention et la maîtrise des maladies non transmissibles, ou encore l’Institut danois pour les droits humains.

La note de triple A obtenue par Philip Morris International renvoie à la question de la fiabilité de ces initiatives volontaires de mesure d’impact environnemental. La divulgation de ces données est à l’initiative du fabricant qui les fournit lui-même, celles-ci pouvant être partielles, vagues, et réalisée selon une méthodologie opaque et incohérente. Sur la question de l’écologie, il existe en revanche une littérature scientifique abondante sur les dégâts considérables occasionnés par l’industrie du tabac, en matière de pollution des eaux, de l’air, des sols, de déforestation.

Notons finalement que cette société et ses représentants font preuve d’un véritable cynisme en invoquant le fait qu’ils sont capables de fabriquer et commercialiser un produit qui tue chaque année un million de personnes dans le monde et 30’000 en France tout en prétendant être exemplaire sur le plan des émissions de CO2.

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