Communiqués de presse

Accueil > Communiqués de presse > Snus ou sachet de nicotine ? le CNCT fait le point

Snus ou sachet de nicotine ? le CNCT fait le point

Paris, le 5 janvier 2023Depuis plusieurs semaines, alors que le fabricant de snus Swedish Match vient d’être racheté par Philip Morris International[1], les médias français et professionnels de santé s’alarment de la popularité croissante du « snus » auprès des adolescents. Il s’agit en réalité de sachets de nicotine, un dérivé sans tabac, qui se développent progressivement sur le marché français, profitant d’un certain flou juridique autour des produits de la nicotine. Une confusion entretenue par l’industrie du tabac elle-même pour tromper le consommateur et espérer infléchir les réglementations autour des produits du tabac.

Promus récemment par les médias et réseaux sociaux mais aussi par des célébrités du sport, ces sachets de nicotine séduisent les plus jeunes et sont déjà vendus en ligne et dans certains débits de tabac.

Des produits différents en dépit d’une présentation et d’un mode de consommation similaire

Le snus, conçu et commercialisé en Suède, est constitué d’un sachet de tabac humide à sucer, vendu dans une ample gamme d’arômes. Ce produit, interdit dans le reste de l’Union européenne dont la France depuis 1992, est néanmoins commercialisé dans plusieurs autres continents (Asie, Afrique et États-Unis). Comme produit du tabac, il présente de nombreux risques sur la santé qui sont bien documentés[2].

Les sachets de nicotine, à la différence donc des snus, ne contiennent pas de tabac, mais une poudre blanche à base de nicotine. Les sachets de nicotine sont commercialisés notamment sous les marques Aroma King en France ; ces produits sont aussi proposés avec un large éventail d’arômes.

La confusion actuelle résulte du même mode de consommation : dans les deux cas, le sachet est placé entre la gencive et la lèvre.

snus-sachets-nicotine

Les sachets de snus ne sont donc pas vendus en France, même s’ils sont marginalement disponibles sur Internet. Les produits mis en avant actuellement sur les réseaux sociaux et au cœur de tous les débats dans les médias sont les sachets de nicotine. Ils ont fait leur apparition dans des débits de tabac sous la qualification trompeuse de « Snus / snuf » au dernier trimestre de l’année 2022 et sur internet il y environ un an.

snus-sachets-nicotine

Un vide juridique autour de ces produits de la nicotine

Les sachets de nicotine sont vendus en France sans déclaration préalable. Les fabricants profitent d’un flou juridique autour des nouveaux produits de la nicotine. En effet, depuis mai 2016, date d’entrée en vigueur de la directive européenne 2014/40/UE sur la fabrication, la présentation et la vente des produits du tabac et produits connexes, les fabricants des produits du tabac et du vapotage ont l’obligation de déclarer certaines informations relatives à la composition, aux émissions, à la toxicité ou encore au volume de ventes de leurs produits avant de les commercialiser à l’Agence Nationale Sécurité Sanitaire Alimentaire Nationale (ANSES). Ainsi, on retrouve l’ensemble des informations relatives aux produits du tabac et du vapotage sur le site de l’ANSES mais aucune sur les sachets de nicotine actuellement vendus en France.

Un risque rapide d’addiction à la nicotine

Ces sachets de nicotine délivrent une dose très importante de nicotine : jusqu’à 20 mg selon certaines marques de sachets de nicotine contre 1 à 3 mg pour une cigarette classique. Cette caractéristique signifie une entrée très rapide dans la dépendance, surtout chez les jeunes qui sont la cible principale du marketing de ce produit à travers les nombreux arômes disponibles.

Si les sachets de nicotine, qui ne contiennent pas de tabac, semblent être une alternative moins risquée que la consommation de produits du tabac dont le snus, une récente étude allemande indépendante a relevé la présence de nitrosamines spécifiques du tabac[3], dont certaines sont cancérigènes (NNN, NNK) dans une grande partie des sachets de nicotine testés. En d’autres termes, ces produits sont très addictifs et leur innocuité n’est pas établie.

Fabriquer le doute et tromper les consommateurs et les décideurs

Ces sachets de nicotine font partie des nouveaux produits sans fumée activement promus par l’industrie du tabac, dans un contexte où les cigarettes manufacturées sont en déclin. Profitant du flou juridique qui entoure encore les produits de nicotine sans fumée dans de nombreux pays dont la France, les industriels utilisent les réseaux sociaux pour diffuser des publicités et recruter des influenceurs qui incitent à consommer ces produits. En les présentant comme des « snus » ou des « snus sans tabac », les industriels entretiennent délibérément la confusion avec l’objectif de revenir sur l’interdiction de vente des snus dans les pays de l’Union européenne.

On retrouve cette même stratégie de fabrique du doute et de la confusion pour les cigarettes électroniques et le tabac chauffé. Ces deux produits sont souvent confondus par le grand public, les médias voire les décideurs. Cette confusion est délibérément recherchée et entretenue par les fabricants notamment Philip Morris qui commercialise actuellement ces deux produits sous la même dénomination d’« alternatives sans combustion ». Les produits du vapotage sont ainsi utilisés comme brise-glace pour la promotion illicite du tabac chauffé : l’IQOS. L’objectif est également d’obtenir une réglementation plus souple pour ce dernier, notamment en termes de fiscalité.

 


[1] Génération sans tabac, Des pourparlers en cours pourraient conduire au rachat de Swedish Match par Philip Morris, publié le 13 mai 2022

[2] L’utilisation du snus augmente le risque de cancer de l’œsophage, de l’estomac, du pancréas et du rectum mais accroît également le risque d’hypertension artérielle, d’infarctus du myocarde ou encore d’accident vasculaire cérébral. Health Risks of Smokeless Tobacco, American Cancer Society, publié le 28 octobre 2020

[3] Génération sans tabac, Traces de nitrosamines et taux importants de nicotine dans les pouches, publié le 16 août 2022

Pour le professeur Yves Martinet, président du CNCT,

« L’industrie du tabac et de la nicotine développe de nouveaux produits pour multiplier les portes d’entrées dans l’addiction à la nicotine. Cette stratégie lui permet d’attirer de nouveaux consommateurs, notamment parmi les jeunes particulièrement ciblés par les actions marketing ». Le Pr Martinet rappelle l’urgence de mieux réglementer l’ensemble de ces nouveaux produits de la nicotine sous peine de voir s’éloigner l’objectif d’une génération sans tabac d’ici 2032 dans le pays.

Contact de presse

Amélie ESCHENBRENNER – communication@cnct.fr

A propos du CNCT

Le Comité National Contre le Tabagisme est la première association qui s’engage et agit pour la prévention et la protection des personnes face aux méfaits du tabac et aux pratiques de son industrie. En France, le tabagisme reste la première cause de mortalité prématurée et évitable. Pour lutter contre ce fléau, le CNCT mène à la fois des actions de prévention afin de sensibiliser sur ces dangers et des actions de plaidoyer pour faire adopter des mesures de protection efficaces.

A lire également: