Protéger les jeunes

Sommaire du dossier

Des mesures efficaces pour prévenir le tabagisme des jeunes

Selon l’expression de David Kessler, ancien directeur de la Food and Drug Administration aux Etats-Unis, le tabagisme est une « épidémie pédiatrique ».

On constate en effet que la très grande majorité des fumeurs à long terme commence à fumer à l’adolescence ; cette réalité est vérifiée quel que soit le pays concerné.

La France est très touchée par le problème du tabagisme des jeunes. L’âge de la première cigarette se situe autour de 12 ans avec une entrée dans la consommation de tabac vers 13 ans, qui aboutit à une moyenne de plus de 40 % de fumeurs chez les 16-25 ans. La France à cet égard, se situe dans le peloton des mauvais élèves au niveau des pays de l’Union européenne.

A l’importance de cette consommation, qui fait du tabac la première drogue consommée par les jeunes, s’ajoute le fait que ces derniers sont massivement exposés, y compris dès la petite enfance, au tabagisme passif.

 

Les fabricants de tabac ciblent directement les jeunes

Ce qui distingue le tabagisme d’autres problématiques de santé publique, c’est qu’il renvoie à ce qu’on appelle une véritable épidémie industrielle. La question du développement de la consommation de tabac, en particulier des jeunes, ne peut se comprendre sans prendre en compte l’activité déployée par l’industrie qui cherche par tous les moyens à vendre ses produits. L’ancienne directrice Générale de l’Organisation mondiale de la Santé, mentionnait ainsi en 2000 :

“La consommation de tabac ne ressemble pas à d’autres menaces sur la santé mondiale. Les maladies infectieuses n’emploient pas des sociétés multinationales de relations publiques. Il n’existe pas de groupes de façade pour promouvoir la propagation du choléra. Les moustiques n’ont pas de lobbyistes à leur service”. Et elle ajoutait que “Le tabac est une maladie contagieuse. La contamination passe par la publicité et le parrainage”.*

 

Lever le voile sur les stratégies des cigarettiers

 

Le CNCT contribue à mettre à jour le véritable visage des fabricants de tabac

Le CNCT s’efforce de faire connaître les stratégies des industriels du tabac pour attirer les enfants et de les contrer. Le CNCT a tout particulièrement contribué à révéler leurs pratiques aux antipodes de leurs déclarations officielles en rendant publics leurs documents internes.

Contrairement à ce qu’affirment les fabricants de tabac, qui prétendent s’adresser uniquement aux adultes, voire soutenir des initiatives en matière de prévention du tabagisme des jeunes, leurs documents internes indiquent que ce positionnement est uniquement une tactique pour demeurer des interlocuteurs respectables et empêcher l’adoption de mesures efficaces portant atteinte à leurs intérêts financiers.

Dans cette perspective, les fabricants vont même jusqu’à financer des programmes de prévention du tabagisme qu’ils conçoivent de telle sorte qu’ils n’aient au mieux aucun impact,  au pire qu’ils s’avèrent contreproductifs. L’objectif est, selon leurs propres termes, de :

1) Réduire les lois proposées et adoptées restreignant ou interdisant nos activités de vente et de marketing ;

2)  Faire voter des lois en faveur de l’industrie ;

3)  Avoir un meilleur appui de la part des entreprises, des parents et des groupes d’enseignants.»

 

D’une manière générale, le CNCT demande qu’une transparence beaucoup plus grande soit exigée de la part des pouvoirs publics à l’égard des fabricants de tabac, afin que ces derniers communiquent leurs données sur l’ensemble des résultats de leurs recherches et études, leurs stratégies de marketing et de développement de leurs ventes, les sommes dépensées en actions de lobbying, etc.

Au travers d’un plus grand contrôle des activités des fabricants de tabac et en se préservant de leur ingérence dans le choix des politiques de contrôle du tabac, comme la France s’y est du reste engagée, la prévention du tabagisme pourra grandement progresser.

En effet, indépendamment des mesures d’éducation à la santé, les mesures efficaces de prévention globale du tabagisme, et en particulier du tabagisme des jeunes, sont bien connues. Elles sont reprises dans le traité international de l’OMS : la Convention cadre de Lutte Anti-tabac. Elles renvoient le plus souvent à des mesures d’ordre général, qui s’appliquent à l’ensemble de la population et dont la pertinence est encore amplifiée pour les plus jeunes.

 

Préserver les jeunes de toute promotion des produits du tabac

 

Le CNCT s’engage au quotidien pour préserver les jeunes de toute incitation à fumer et casser l’image valorisante véhiculée par les univers publicitaires des marques de produits du tabac

La publicité, les promotions et le parrainage jouent un rôle essentiel dans l’incitation à commencer à fumer, à accroître sa consommation, à passer d’une consommation occasionnelle à une consommation régulière, à dissuader d’arrêter et enfin à inciter à reprendre pour les fumeurs qui auraient arrêté de fumer.

A contrario, on a pu mesurer que la disparition de la publicité contribue à réduire la consommation de tabac, notamment celle des jeunes et contribue à casser l’image positive associée au produit.

Le CNCT a fortement plaidé pour la mise en œuvre d’une mesure d’interdiction complète de toute publicité en faveur des produits du tabac, sachant que des interdictions partielles sont inefficaces car les fabricants transfèrent leurs investissements publicitaires vers d’autres supports.

L’association veille attentivement à ce que les opérations promotionnelles et publicitaires de ces fabricants, totalement illicites, soient poursuivies et sévèrement sanctionnées. Le CNCT est ainsi à l’origine de l’ensemble des avancées de la jurisprudence protectrice dans ce domaine.

Enfin, au regard des pratiques permanentes de contournement des fabricants et de leurs violations réitérées en dépit des condamnations définitives prononcées chaque année à leur encontre, l’association milite pour l’adoption de nouvelles dispositions, dont l’efficacité a été avérée et qui sont fondées sur les meilleures pratiques d’autres pays.

Ces mesures portent en particulier sur :

– La disparition de la publicité sur les lieux de vente. En effet, en France, la publicité sur le lieu de vente est légale, mais dans un cadre bien strict, qui n’est nullement respecté par les fabricants. Or, les débits de tabac connaissent depuis plusieurs années un processus de diversification soutenu et sont de plus en plus fréquentés par des jeunes venus acheter leurs confiseries, cartes de téléphone portable, vignettes de collection… Ils se trouvent ainsi exposés à des publicités incitatives, qui vont à l’encontre de tous les messages de santé et de prévention qui peuvent leur être transmis.

–  L’obligation de vente sous le comptoir ou dans des tiroirs comparables à ceux des médicaments. Les étals sont, en tant que tels, un moyen pour attirer en particulier les plus jeunes par la présentation de paquets extrêmement séduisants, colorés et qui font de plus en plus l’objet de collections parmi les adolescents,

–  La préservation à l’égard des placements de produits publicitaires particulièrement présents dans les films et jeux vidéos, très prisés par ce public,

–  La réglementation stricte des activités des entreprises du tabac dans leurs promotions d’ « entreprises socialement responsables ».

Selon l’OMS, « la responsabilité sociale des entreprises dans l’industrie du tabac est une antinomie en soi car les fonctions fondamentales de l’industrie sont en contradiction avec les buts visés par les politiques de santé publique concernant la lutte contre le tabagisme ».

–  La suppression du packaging en tant que support publicitaire en instaurant des paquets standards, c’est-à-dire des paquets de produits du tabac pour lesquels toutes les références à l’univers publicitaire de la marque seraient supprimées, en ne conservant que le nom de la marque écrit d’une manière générique pour tous les fabricants, et en conservant les messages d’avertissement sanitaire et d’information pour l’aide à l’arrêt. Ces paquets réduisent l’image positive des marques, et a contrario créent une image négative du produit. Ils permettent d’envoyer un message sanitaire fort et clair sur la dangerosité du produit et ils améliorent l’efficacité des avertissements sanitaires.

 

Dissuader les jeunes de commencer à fumer

 

Une politique fiscale dynamique constitue le moyen le plus efficace pour dissuader les jeunes de commencer à fumer

Augmenter régulièrement les taxes sur l’ensemble des produits permet d’avoir des prix dissuasifs. En effet, une augmentation des prix de 10% induit une diminution des ventes de 4% en moyenne dans les pays développés et jusqu’à 8% dans les pays à faibles revenus.

Cette baisse est plus sensible encore pour les jeunes : dans un pays comme la France, une hausse de 10% induit une baisse de la consommation des jeunes de l’ordre de 8%.

Des prix élevés sont par ailleurs associés à une réduction du nombre de jeunes commençant à fumer.

Le CNCT soutient une politique fiscale dynamique. Il rappelle cependant que cette politique fiscale est pleinement efficace si :

  • Les hausses sont suffisamment massives : des augmentations de 5-6% ne font qu’accroître les marges bénéficiaires des fabricants sans réduire la consommation,
  • Elles sont répétitives, sinon, leur effet s’estompe dans le temps,
  • Elles concernent tous les produits du tabac afin d’éviter un transfert de consommation vers des produits moins chers que les cigarettes, comme le tabac à rouler, la shisha …  tout aussi toxiques. Cela suppose donc d’aligner la structure de la fiscalité des autres produits du tabac sur celle des cigarettes manufacturées les plus chères.Une partie des recettes fiscales est affectée directement à la prévention du tabagisme et à l’aide à l’arrêt des fumeurs.

 

Le CNCT agit pour protéger les jeunes de l’exposition au tabagisme passif

L’exposition au tabagisme passif des enfants et adolescents est particulièrement importante. Or les risques à leur égard sont d’autant plus graves que leurs capacités pulmonaires ne sont pas encore matures et qu’ils sont très sensibles aux toxiques de la fumée de tabac.

Le CNCT a soutenu et fortement contribué à l’instauration de la protection de tous à l’égard du tabagisme passif au travers de la mesure d’interdiction de fumer dans l’ensemble des lieux de travail et d’accueil du public. En effet, cette mesure qui protège dorénavant les enfants dans les établissements scolaires, d’enseignement et de formation, induit des changements de comportement chez les fumeurs, y compris à leur domicile, où ils exposent moins leur entourage.

Par ailleurs, l’interdiction de fumer dans les lieux à usage collectif contribue grandement à modifier la norme qui n’est plus celle de fumer partout. Les jeunes peuvent aujourd’hui sortir en discothèque, dans un café et profiter pleinement de ces lieux de convivialité libérés de la fumée de tabac.

La mesure d’interdiction de fumer fait partie du processus qualifié de « dénormalisation » de la consommation de tabac.

 

Communiquer et prévenir

 

Faut-il une communication ciblée pour les jeunes ?

Oui et non.

Nombre de campagnes qui s’adressent à l’ensemble de la population sont très efficaces aussi parmi les jeunes.

Il est possible cependant de développer certaines thématiques auxquelles ces derniers sont plus réceptifs.

Le CNCT milite pour le développement de messages de prévention axés non seulement sur les risques pour la santé mais également sur d’autres problématiques susceptibles de toucher davantage les jeunes comme :

  • le coût économique du tabac ;
  • l’impact sur l’environnement ;
  • les manipulations dont ils font l’objet de la part de l’industrie du tabac pour les attirer et les rendre addicts aux produits ;
  • l’incidence sur leur physique, leur sexualité et leur intégration sociale.

Ces messages de prévention peuvent être diffusés dans le cadre de campagnes grand public et également directement sur les paquets des produits du tabac, vus non seulement par les fumeurs mais aussi par les non-fumeurs.

 

Le CNCT demande l’application effective de mesures spécifiques pour la prévention des jeunes

Un certain nombre de mesures complémentaires, plus ciblées sur les jeunes, ont également été préconisées. ¨Parmi ces mesures, on peut citer :

  • l’interdiction de la vente à l’unité ;
  • l’interdiction des distributeurs automatiques ;
  • l’interdiction des paquets enfants que ce soit de petits paquets de produits du tabac rendant le paquet moins cher et plus accessible financièrement ou les jouets sous forme de paquets de cigarettes ;
  • l’interdiction de vente de produits du tabac aux mineurs.

Cette dernière mesure, en tant que telle, a une efficacité si le taux d’application est supérieur à 80% ce qui, malheureusement, est loin d’être le cas en France.

De plus, ces mesures doivent impérativement être associées à l’ensemble des autres dispositions générales précédemment développées.